Au nord du monde, Marcel Théroux
Ed. 10/18, traduit de l'anglais (GB) par Stéphane Roques, novembre 2011, 347 pages, 8.4 euros.
Le roman post apocalyptique est à la mode. Est-ce symptomatique d'une société malade ou la foi que tout peut encore changer?
Et si nous étions les artisans de notre propre perte?
Pourtant
post apocalyptique, ce roman n'a rien à voir avec La Route de
McCarthy car il nous offre un monde où les animaux et la nature ont
repris leurs droits et permettent à la population survivante de vivre au
jour le jour.
Marcel Théroux part du constat que c'est l'homme qui a
détruit la civilisation: modifications climatiques, progrès, anthrax,
les causes sont multiples pour une seule conséquence: la disparition de
nos sociétés. Certes il y a eu des familles comme celles de Makepeace
qui, citadins de Chicago, ont préféré construire une nouvelle vie comme
colons Quakers en Sibérie, mais ils furent vite envahis par des hordes
de gens affamés, fuyant les villes et la pauvreté. Finalement, Makepeace
erre et survit dans sa ville fantôme. Ce qui est surprenant, c'est
qu'elle reste assez optimiste sur son sort et garde foi en ses
semblables:
"j'ai beau essayé, je n'arrive pas à désespérer du genre
humain."
C'est la vue d'un avion volant dans le ciel (espoir que le
monde moderne existe encore?) qui la pousse à traverser le Grand Nord à
la recherche, pourquoi pas, d'une nouvelle vie. Et même si "le monde
n'est pas sentimental, il est sans pitié", Makepeace fait découvrir au
lecteur une nouvelle humanité qui s'organise avec son lots d'espoirs et
de perfidies. On traverse la Zone, la Base, la ville de Polyn 66 et ses
mystérieuses radiations, comprenant petit à petit ce qui est arrivé.
Quelque part, ce roman est un avertissement, la possibilité d'une autre
vie avant que les choses dégénèrent, avant que "les êtres déracinés,
rendus fous par l'argent, ramollis par le train-train quotidien, piégés
par la violence des villes nocturnes et pluvieuses" deviennent les
artisans de leur propre perte et que les survivants assistent chaque
jour "à la fin de toute chose".
Un très bon livre qui fait réfléchir.