Ed. Grasset, mai 2005, 295 pages, 19.8 euros
Au bout de soi
Tout
le monde connaît "l'énorme "tableau de Géricault représentant quinze
hommes sur un radeau de fortune tentant désespérément de prévenir un
bateau au loin. Ce roman raconte l'histoire de Jean Baptiste Savigny,
chirurgien enrôlé à bord de la Méduse, frégate en route pour le
Cap-Vert, et survivant de cette terrible histoire.
Savigny, étudiant en chirurgie, embarque un peu par hasard
comme marin de "la Société philanthropique des explorateurs du Cap
Vert". Une déception amoureuse et une nuit de beuverie ont eu raison de
sa volonté d'un autre avenir. La vie à bord n'est pas trop pénible, mais
tout se complique lorsqu'il faut évacuer le bâtiment, enlisé sur un
banc de sable pourtant bien connu des cartes maritimes de l'époque.
Savigny reste donc avec plus de cent quarante autres compagnons sur le
radeau construit à la hâte. Mais, vite lâchés par ceux qui devaient
les protéger, ces hommes vont vivre (pour les derniers survivants) trois
semaines d'enfer...
Dans un langage parfois fleuri mais qui n'entache en
rien le contenu, l'auteur raconte l'histoire à l'origine du tableau,
pour terminer ensuite sur sa réalisation.
Ce qui est très agréable,
c'est que le récit fourmille d'anecdotes bien au fait de la mentalité de
l'époque. Très bien construit, la détresse et le malheur se comprennent
dans la description des visages des survivants plutôt que dans la
description froide de faits terribles.
Savigny reste lucide: "quand le
malheur ne cesse de succéder au malheur, l'accumulation des calamités
provoque une forme de sérénité désabusée", dit-il alors qu'il est est
persuadé de mourir de faim sur le radeau.
Justement, cette faim
lancinante sera à l'origine d'un acte terrible que des gens
"bien-pensants" leur reprocheront. Or, notre narrateur explique: "plus
j'y réfléchis, plus je suis convaincu que la loi morale est un luxe de
repus".
Il faut considérer ce roman comme un témoignage historique très
bien documenté, bien écrit, et qui se lit avec plaisir de bout en bout