jeudi 8 décembre 2022

Sous le pont...

Keigo Higashino n'est pas à son coup d'essai. En effet, déjà primé en France au Festival Polar de Cognac en 2010 avec La maison où je suis mort autrefois, l'auteur nous raconte à travers des enquêtes policières bien calibrées une vision assez méconnue de la société nippone.
Les Sept divinités du bonheur ne déroge pas à la règle. Un homme, haut responsable d'une société prospère, meurt poignardé sur un pont de Tokyo connu pour ses statues ailées de dragons, les quilins, mais aussi pour être le point zéro des routes nationales japonaises. L'affaire semble bouclé très vite puisqu'un suspect s'écroule un peu plus loin, renversé par un camion, en possession des affaires de la victime. En plus, le mobile est parfait puisque le malheureux est un chômeur, ancien salarié du premier.

Pour Kaga, inspecteur en charge du dossier, l'affaire est trop vite pliée. Le diable se cache dans les détails. Mieux vaut fouiller dans le passé du mort et du prétendu criminel pour chercher une autre vérité.

A travers l'enquête, l'écoute des témoins, dont la compagne enceinte du suspect, c'est une société japonaise à deux vitesses qui est décrite : le harcèlement des faibles par les forts, les difficultés à se loger, à boucler les fins de mois, les contrats précaires qui se multiplient à défaut de devenir pérennes. Et de l'autre côté, la société bien confortable où on tait la honte et soigne le remords à coups de prières et d'offrandes faites aux sept divinités du bonheur sous la formes de grues en papier aux multiples couleurs. L'air de rien, c'est aussi le système scolaire qui est pointé du doigt.

Ce n'est pas le premier polar que je lis de l'auteur (voir ICI) mais ce dernier roman m'a semblé assez redondant. J'ai eu l'impression plusieurs fois que l'enquête piétinait, revenait sur ses pas afin d'entretenir un suspens somme toute superflu. Néanmoins, le personnage de l'inspecteur Kaga rafle la mise. Taiseux, secret, efficace, il tient à lui tout seul la colonne vertébrale du récit pour offrir une situation finale assez remarquable.

Pour les amateurs du genre.

Ed. Actes Sud, collection Actes Noirs, septembre 2022, traduit du japonais par Sophie Refle, 304 pages, 23.50€ 

titre original : Kirin no Tsubasa