"Nous sommes l'ambulance du pauvre et aussi le prêtre du pauvre, c'est triste à dire mais notre taxi est le confessionnal où les gens expriment leurs pires frousses et tous leurs préjugés".
Pour tenir le coup, supporter les heures supplémentaires, les colères ou les confessions de sa patronne au téléphone et les lubies des clients, Lou carbure à la boisson énergisante et aux psycho stimulants. N'empêche, même un peu dans les vapes, il reste un observateur lucide de la misère humaine réfugiée dans des motels miteux ou des bungalows remplis d'humidité. Même lui vit dans une de ces caravanes normalement mais l'évite de peur de devoir encore affronter une dispute avec sa compagne du moment au bout du rouleau...
"Pour autant que je sache, c'est ça, mon boulot : aider ceux qui sont dans le besoin puis les abandonner le plus vite".
C'est la vie d'un chauffeur de la société Mississippi All Saints qui est décrite et souvent, on a l'impression que vérité et fiction se confondent. Lou sombre peu à peu, tout comme sa Moondog dont les freins sont à l'agonie. Pourtant dans une vie passée, il a été professeur dans une faculté où il a tenté - en vain - de transmettre sa passion pour Shakespeare.
A travers le personnage de Lou, Lee Durkee raconte les laissers pour compte, l'envers du rêve américain avec un réalisme qui laisse aussi de la place à l'humour. D'ailleurs ce roman est construit comme autant de nouvelles offrant un kaléidoscope propice aux réflexions existentielles du chauffeur. De fait, ce livre mérite vraiment un détour pour s'y attarder.
Ed. Flammarion, août 2021, traduit de l'anglais (USA) par Nicolas Richard, 304 pages, 21€
Titre original : The Last taxi driver