Ed. Grasset, traduit de l'anglais (GB) par Florianne Vidal, novembre 2014, 576 pages, 21.5 euros
Du rififi chez les écrivains.
Cormoran Strike est sur le point de rembourser toutes ses dettes. La résolution du meurtre de Lula Landry (L'appel du coucou, novembre 2013) lui a valu une telle notoriété qu'il se trouve désormais débordé. Son quotidien se résume à la surveillance des maris ou des épouses adultères fortunés. Certes, ça paye, mais il a l'impression de ne servir que les intérêts de personnes qui n'ont que le mot argent à la bouche. Alors, quand Leonora Quine, avec sa mise simple, ses cheveux gris, entre dans son bureau pour lui demander simplement de retrouver son époux pour qu'il rentre à la maison, Strike éprouve de la compassion et accepte.
Léonora est la femme d'un écrivaillon, un certain Owen Quine, auteur jadis remarqué du Pêché du Hobart, mais surtout reconnu pour être un trublion dans le monde de l'édition et un casse-pied fini. Ce n'est pas la première fois qu'il fuit le domicile conjugal pour prendre du bon temps avec une de ses maîtresse, mais cette fois-ci, il n'est pas rentré. Cette attitude est d'autant plus surprenante que Leonora n'est pas seule avec lui; en effet, ils gardent leur fille, Orlando, handicapée mentale, mais surtout Quine était sur le point de faire éditer un roman sulfureux, une petite bombe littéraire intitulée Bombyx Mori, "un fratras amphigourique et souvent obscène", dans lequel les personnages codés représentent tous des personnages véritables.
"Bombyx Mori était une version abâtardie du Voyage du pélerin. L'action se déroulait dans un pays imaginaire mais haut en couleur. Le héros éponyme (un écrivain de génie) quitte son île natale, remplie de crétins incapables de reconnaître son talent, pour entreprendre un genre de voyage initiatique vers une contrée lointaine."
Quelques épreuves parviennent à des personnes bien intentionnées quand, au même moment, on retrouve le corps outragé de Quine, dans une position insolite et sinistre, le tueur ayant veillé à une véritable mise en scène théâtrale. Pour Strike, la vérité se cache forcément entre les lignes du roman, et donc forcément chez l'éditeur et tout ce qui gravite autour...
Cependant, l'enquête se révèle délicate: son moignon le fait souffrir, Londres et le Royaume-Uni subissent une tempête de neige, et Robin, la secrétaire doit bientôt se marier. Enfin, pour couronner le tout, Charlotte, son ex, elle aussi sur le point de s'unir, recommence à lui envoyer des SMS...
En lisant Le ver à soie, on ne s'ennuie jamais. Tout est impeccablement orchestré, balisé, cohérent, et les personnages secondaires ajoutent du pep's à l'ensemble. De plus, le duo Strike-Robin évolue. On ne parle pas encore de couple, mais le lecteur sent que ces deux-là s'apprécient beaucoup et se protègent l'un l'autre. Ainsi Strike ne peut évoluer sans Robin et Robin sans Strike.
Le titre est un indice, une métaphore littéraire concernant l'écrivain " qui doit souffrir le martyre pour obtenir un bel ouvrage".
Enfin, Robert Galbraith (J.K Rowling) n'épargne pas le milieu éditorial et son climat malsain: coup bas, hypocrisie, amitiés faussées, argent.
Un pur plaisir de lecture!