vendredi 14 novembre 2014

Le jardin du mendiant, Michael Christie

 Ed. Albin Michel, août 2012, traduit de l'anglais (Canada) par Nathalie Bru, 320 pages, 21.5 euros

Le déclin est pour bientôt...


Neuf nouvelles dont la dernière donne le titre au recueil. Mais peut-on qualifier ces neuf récits de
nouvelles? En effet, la difficulté du genre tient dans la fin ou plutôt la chute. Sans chute, la nouvelle n'en est plus réellement une. On attend le revirement de situation, le balancement qui donnera une toute autre dimension à une histoire parfois ronronnante ou ennuyeuse.
Michael Christie a fait le choix de "zapper" ce critère essentiel. Il faut aborder les neuf histoires comme neuf tranches de vies, neuf prismes de la société canadienne. Or, il ne s'agit pas d'une vue globale de cette société: les nantis et les privilégiés sont volontairement oubliés, au profit justement de ceux qu'on oublie sans cesse, les exclus, "les petites gens", c'est à dire ceux que nous, personnes affairées et sans cesse pressées nous ne voyons plus.
Les personnages ont tous en commun un passé douloureux qui les ont amenés dans un océan de solitude. Il semble que rien ne peut changer le cours des choses, d'où peut-être le choix de ne pas proposer de chutes à proprement parler.
Ce livre se veut être un diaporama des conséquences de la société de consommation sur les hommes, en tout cas l'auteur ne prend jamais parti, se contentant de décrire de manière clinique et distanciée chaque tranche de vie évoluant dans un décor désolé:
"Il longea des rues mornes bordées de vitrines abandonnées où des individus mal en point agités de mouvements nerveux se rassemblaient comme des pingouins sur l'Antarctique. Il se vit proposer de la drogue par des types tremblotants, que son absence de réponse sembla déconcerter. Dans un terrain vague, deux hommes s'agrippaient par les cheveux, au-dessus d'une couverture pleine de cassettes VHS, chacun demandant à l'autre de lâcher prise. "

Finalement, ce sont neuf nouvelles annonçant le déclin...