La rébellion a un nom.
Nous sommes en 1979. La Guerre totale déclarée en 1957 a ravagé le monde. Désormais, les pays n'ont plus de noms: ce sont des Zones divisées en trois couleurs en fonction de leur potentiel de contamination: Zones blanches (saines), Zones grises (suspectes), Zones noires (interdites).
La République française n'est plus qu'un souvenir. Pour rétablir l'ordre, il a fallu instaurer de nouvelles règles et mettre en place un nouveau système sociétal. L'île sur laquelle vit Méto est partie intégrante de cette nouvelle politique:
"Notre île ressemble à une étoile de mer. C'est une île d'origine volcanique avec une montagne au centre: l'ancien volcan. On a construit la Maison au fond du cratère."
A cet endroit, les jeunes garçons vivent en communauté, surveillés jour et nuit par des gardiens, les César. La Maison n'est que la version humaine d'"une batterie de poulets": les sentiments, l'empathie, le chagrin sont endigués au profit de l'égoïsme et le dépassement de soi. La violence est exploitée dans un sport que tous adorent: l'inche, archétype barbare du football. Chaque enfant est affublé d'un nom d'origine romaine: Rémus, Claudius, Octavius, Crassus... En cas de désobéissance, le frigo est la punition!
Seul Méto détonne. En grandissant, ce dernier commence à se poser des questions sur ses véritables origines. Et puis, que deviennent les enfants devenus "trop vieux" et qui disparaissent du jour au lendemain de la maison?
Apparemment, il n'est pas le seul à cogiter. Il n'est pas rare de trouver inscrit dans les toilettes, "je veux savoir d'où je viens et ce qu'on devient après. SVP". Or les César veillent: le secret des origines est bien gardé.
Méto sait très bien qu'il n'est pas né le jour de son entrée dans la Maison. Rebelle, il décide d'organiser une mutinerie qui, non seulement lui permettra de voir ce qui se passe à l'extérieur des murs de la Maison, mais aussi de trouver des réponses à toutes ses questions. Or, ce qui se passe à l'extérieur est une version édulcorée de l'intra muros: querelles des tribus, vie spartiate dans des grottes de fortune, habitants hostiles. Même la plage n'est plus un refuge paisible:
"La plage, c'est le refuge des lâches, des idiots ou des éclopés, des indignes, de ceux qui ont renoncé à se battre (...) Ils sont loin de la frontière et des lieux de confrontation. Pour eux, la vie est sans risques."
Cependant, Méto va y trouver des alliés inattendus qui vont lui permettre de mettre au point une ruse grandiose pour se rendre sur le continent et percer le secret de l'île et de son dirigeant, l'énigmatique Jove. Parfois, la vérité est bien plus noire qu'on ne croit!
Yves Grevet a fait le pari de l'uchronie: il a créé un monde totalement original, réfléchi, et fonctionnel, archétype d'un système totalitaire interne. Même la notion de famille n'existe plus en tant que telle. Tous nos concepts sont mis à mal et remaniés par l'AZIL, l'Association des Zones Indépendantes Libres, remplaçante de l'ONU...
Les trois tomes ne sont pas de trop pour présenter au lecteur cette société étrange. Au fur et à mesure, Méto grandit, mûrit, fait des choix, si bien que pour les uns, il est Méto le rebelle, pour les autres, Méto le traître. Question ruse, il n'a rien à renier à l'ingénieux Ulysse de la Guerre de Troie. Il est le symbole même de celui qui inspire à un monde meilleur et va tout mettre en œuvre, au péril de sa vie, pour réussir.
Méto est un roman prenant, captivant, qui par son sujet de Science-fiction attirera à coup sûr le lecteur curieux avide d'originalité.
A partir de 12 ans.