mardi 28 janvier 2014

L'amour est une île, Claudie gallay

Ed. J'ai Lu, octobre 2012, 413 pages, 6.9 euros

 

"L'amour est une île. Quand on part, on ne revient pas." 

 

J'ai eu du mal à entrer dans le texte, puis petit à petit, les chapitres m'ont apprivoisée.Claudie Gallay a voulu, je pense, écrire un roman total sur l'amour, le théâtre, la vieillesse, la souffrance. Choisir Avignon, en été, en pleine grève des festivaliers, ne fait que rajouter au climat poisseux et suffocant de ce livre.
L'héroïne, Marie, est une incarnation de la souffrance de vivre. Selon Odon, elle a un tempérament sauvage, "c'est un animal pris derrière les barreaux", "vivre la fait souffrir (...) et le plaisir l'amène au dégoût".
De manière récurrente, elle mord, elle se griffe pour faire "suinter sa colère qu'elle enterre profond en elle", pour se rappeler qu'elle est en vie mais que son frère, lui, est mort...Ambiance!
Au milieu de cette souffrance et des grèves, Odon et Mathilde se retrouvent dix ans après leur séparation, et leurs sentiments restent intacts. Les corps se cherchent toujours, mais la vie, les circonstances et le vécu font que beaucoup de choses ont changé. Mathilde est célèbre, Odon est un directeur de théâtre fataliste qui cache un lourd secret "littéraire" avec son ancienne maîtresse.
Et en pleine moiteur, durant cette oppression, des personnages plus rayonnants permettent d'équilibrer le roman. Isabelle est vieille maintenant mais elle a connu tous les grands du théâtre et de l'art. Elle dit: "vieillir, ce n'est rien quand on se souvient. C'est l'oubli qui fait la souffrance". Ses souvenirs hétéroclites permettent d'introduire un rayon de soleil dans la vie de Marie, qu'elle héberge le temps du festival.
Marie ou par qui le malheur arrive.....mais chut!
Les chapitres sont courts, les digressions nombreuses peut être pour mieux imprégner l'ambiance. La chaleur décrite donne l'impression d'un ralenti d'ensemble qui se ressent même dans le style de l'écriture. Les répétitions sont importantes et parfois pesantes, mais peut-être est-ce encore pour donner une impression de "sur place".
Les personnages sont entiers, notamment Marie, personnage écorché vif qui essaye de vivre à travers ce que son frère aurait pu devenir si...
Et enfin, il ne faut pas oublier Avignon et le théâtre, Avignon et son festival où les acteurs et les "hommes de l'ombre" ne vivent que pour lui et surtout veulent vivre correctement grâce à lui.
Bref, un roman étrange et pesant dans lequel Claudie Gallay a voulu rassembler toutes les émotions.