Ed. Ecole des Loisirs, septembre 2012, 168 p. 8,5 €
Sandra
est une adolescente avec un caractère et une vie en accord avec son
âge, sauf qu’elle traîne aussi deux problèmes récurrents : sa famille et
un mystérieux amoureux.
Malgré un aspect bourru certain et des
répliques qui font mouche, Sandra est sûrement l’élément le plus
équilibré de la cellule familiale. Son père, agent de voyages timide au
point de se sauver lorsque les clients s’annonçaient, soigne son
mal-être enfermé dans sa chambre entouré de paquets de chips… Quant à sa
mère Sarah, comédienne en devenir (et ratée) « qui se fiche
éperdument de se ridiculiser devant des millions de téléspectateurs en
jouant une fliquette dans un costume de location », elle n’a jamais la maturité requise pour être une vraie maman.
« Ma mère m’a appelée Sandra non pas
à cause de cette comédienne au sourire narquois, à l’œil pétillant et
aux fesses rebondies, mais parce qu’elle s’appelle Sarah et que “Sandra
et Sarah, ça fait comme des sœurs tu trouves pas ?” Elle n’a pas pensé
une seconde à Sandra Bullock et au mal qu’elle pouvait me faire… »
Le second problème est un
mystérieux personnage au pseudo délirant : « endive au jambon ». Ce
dernier lui envoie régulièrement des mails d’amour et poétiques. D’abord
choquée, puis intriguée, Sandra se prête au jeu et espère intimement
que l’endive en question est un superbe jeune homme du lycée.
Justement le « bahut », parlons-en :
entre la copine qui ne comprend rien et qui confond tous les mots de
vocabulaire (ce qui nous vaut souvent des dialogues hilarants) et les
amours qui se cherchent, Sandra se forge une carapace et endosse, chaque
jour, une personnalité nouvelle. Elle « tâtonne » car elle veut se
sentir bien : de sa « vie de tigre du Bengale sous antalgiques », en
passant par sa « vie de dinde aux marrons » ou sa « vie de caniche
royal », il lui faudra « subir » vingt-cinq métamorphoses pour enfin
entamer sa « vie de Sandra Bullock », l’identité de son mystérieux
correspondant et le moyen de supporter sa famille :
« Je n’ai pas toujours été
mécontente de mon sort. Il y a peu de temps encore, l’originalité de ma
famille me procurait une certaine fierté. Aujourd’hui j’ai l’impression
d’être un caniche dans une baignoire, au bord d’un siphon géant ».
Sandra est un personnage attachant. Le
roman a le mérite de ne jamais sombrer dans la caricature en proposant
le portrait d’une adolescente en péril et en constante opposition.
Sandra résonne (ouf) et propose à ses lecteurs un point de vue décalé et
pertinent sur ce qu’elle vit et ce qui l’entoure. De ce fait, le récit
est porté par des personnages percutants, souvent drôles, aux dialogues
qui font mouche. Certains passages sont jubilatoires mais laissent de la
place à la tendresse d’ensemble que se portent les protagonistes.
Sandra est l’archétype même de la jeune fille ado « en devenir » si bien
que le lecteur du même âge n’aura aucun mal à s’identifier.
Véritable coup de cœur jeunesse à partir de quinze ans.