jeudi 23 septembre 2021

Suivez le chat !

 


Dans ce premier roman construit comme un recueil de nouvelles, Nick Bradley décide de rendre hommage au Tokyo qu'il connaît : envoutante, hypnotique et étrange, et le lecteur se laisse conduire par un chat errant.


"Dans ses yeux d'un vert lumineux, je  vis quelque chose. Quelque chose de chaotique. Une ville se reflétait dans ses iris. Comme si ce chat nous voyait tous nous agiter, et de même que l'image de la ville rebondissait contre ses rétines sans s'y imprimer, le chat rejetait toute idée de contrôle par l'homme. Ce chat n'avait pas de maître".

Ce chat a pris vie alors qu'un tatoueur dessinait la mégalopole de Tokyo sur le dos d'une jeune femme énigmatique. A chaque fois qu'il reprenait son ouvrage, il remarquait que le chat avait changé de place.... Décidément ce félin a la bougeotte. Il erre de quartiers mal famés en rues tranquilles pour trouver sa pitance quotidienne, sans jamais rester attaché trop longtemps aux humains. Parfois, n'est-ce pas lui qui prend les traits d'une jeune fille aux verts qui semblent percer ceux qui croisent de son regard ?

"Quand il fermait les yeux pour se représenter la ville, il ne la voyait plus qu'au niveau de la rue".

Comme le chat, les personnages de Nick Bradley n'arrivent plus à prendre de la hauteur. Tokyo, les a happés, véritable mante religieuse qui prend le temps avec ses proies multiples. Ainsi, la narration navigue souvent entre le rêve et le fantastique. La moindre panne de courant dans un restaurant isolé n'augure rien de bon, la tournée des bars entre salarymen devient glauque, l'enquête du détective privé prend un tournant inattendu

Mais le chat n'est pas l'unique fil d'Ariane du roman. En filigrane, les personnages gravitent autour d'un autre, disparu, écrivain de son état, connu pour ses récits de science-fiction, un certain Nishi Furuni. De près ou de loin, il a influencé le cours de ces existences que Tokyo aimante. Comme le chat, il possède une aura mystique avec laquelle il faut composer.

Tokyo , la nuit tient ses promesses. Le lecteur déambule dans ses rues, au bord d'un taxi ou à pied et prend le pouls de la ville avant de se laisser volontiers engloutir par la justesse de la narration et l'originalité de son contenu. A souligner, la couverture de ce livre est très réussie.


Ed. Belfond, juin 2021, traduit de l'anglais (GB) par Maxime Berrée, 320 pages, 21€

Titre original : The cat and the city