Douze nouvelles internationales qui promènent le lecteur d'un continent à un autre et dont les titres sont les abréviations d'aéroports. Douze nouvelles dont le fil rouge sont les personnages imperceptiblement liés entre eux. Chacune possède une temporalité identique et impose, sans en avoir l'air, un thème récurrent : l'angoisse face à ce qui nous échappe.
Dans le dictionnaire Larousse, le mot Turbulence est à la fois un trait de caractère, une agitation bruyante et désordonnée et des troubles qui perturbent un domaine ou un secteur d'activité. On retrouve toutes ces définitions dans les récits qui composent le recueil.
Les personnages prennent l'avion pour fuir ou pour affronter un événement qui les dépasse et déjà, durant le vol, une zone de turbulences apparaît, comme annonciatrice d'un futur proche discordant.
"C'est à ce moment là que l'appareil fut secoué d'un premier soubresaut. La moindre turbulence la contrariait car elle dissipait l'illusion de sécurité, l'empêchait de se croire à l'abri". (LGW-MAD)
Souvent, ces êtres en transit font du vol qui les transporte une bulle de temporalité qui va leur permettre de faire le point sur leur vie ou sur leurs choix.
"Elle se réveilla dans l'obscurité tranquille de la cabine. Ce n'était pas la première fois et, comme toujours, ce qu'elle éprouvait n'était pas tant la sensation d'avoir dormi que celle d'une discontinuité dans sa présence au monde. L'obscurité tranquille de la cabine. Le calme, pas le silence".
Le réel s'éloigne au profit de la pause éphémère, si bien que chaque turbulence ressentie même si elle ne dure que quelques secondes est perçue comme "sévère" ou "choquante". (MAD-DSS)
A chaque fois, les passagers vont à la rencontre d'un événement qui les perturbe : une maison incendiée, un père malade, un frère qui doit de l'argent, une fille sur le point de se marier... Chacun semble "apparaître dans leurs existences comme une épreuve décisive dont ni l'une ni l'autre ne sortiraient tout à fait indemnes, quoi qu'il arrive par la suite. C'était un de ces événements qui font que nous sommes qui nous sommes, à nos yeux et aux yeux des autres". (YYZ-SEA)
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Dès lors, se pose la question pour ces gens inquiets de savoir si on connaît véritablement ceux qui nous entourent. La question reste en suspens mais des éléments de réponse parviennent qui tendent à croire que non, on ne peut pas, car il existe en chacun de nous une face cachée, honteuse ou que l'on perçoit comme telle. Dans YYZ-SEA, Marion n'arrive pas à avoir une réaction appropriée lorsque sa fille Annie lui annonce que son nouveau petit fils est aveugle de naissance.
"Elle avait conscience de son propre échec en tant qu'être humain. Elle avait envie de partir, mais elle savait aussi que cette envie ajoutait à son lamentable échec, de sorte qu'elle avait du mal à regarder Annie dans les yeux".