La littérature inspire. Elle est une passerelle, un fil d'Ariane...
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Tu tiens enfin dans ta main
ce qui va transformer ta vie, crois-tu. Fini cette existence de misère faite de
petits boulots étriqués, mal payés, de fins de mois à crever de faim, de coups
de fil intempestifs de la banque ou des pleurs de ta femme qui ne sait plus
comment jongler avec ce qui reste en réserve.
Tu as souvent lorgné sur
l’opulence de ton voisin, sa belle berline toujours très propre, ses habits, sa
villa avec sa grande piscine donnant sur la baie alors que ton appartement
était posé sur un terrain en friche entouré d’un grillage misérable. Tu savais
qu’il traficotait, mais ton éducation et ta crainte des autorités t’empêchaient
de suivre le même chemin.
Alors tu galérais, encore et
encore.
Mais depuis hier, tout a
changé sur ton île. Le destin a voulu que tu te sentes fort après l’ouragan. Tu
as survécu, ta femme et le bébé aussi. Tu fais partie des chanceux !
Alors, lorsque tu passes devant cette armurerie éventrée, c’est un signe du
destin, tu en es persuadé.
Ce reflet argenté, cette
crosse lourde et puissante, c’est ta chance !
Désormais, on te respectera,
c’est toi la loi. De toute façon Irma a tout détruit sur ton passage. Tout le
monde pleure alors que toi tu y vois un signe de Dieu : enfin égaux !
Les riches vont enfin morfler ! Comme toi, ils vont apprendre à vivre avec
ce qui reste.
Tu tiens dans ta main ce qui
va enfin transformer ta vie, et cette arme est le prolongement de ton bras. Elle est
l’incarnation de ta puissance, de ton nouveau moi enfin révélé.
©Virginie Neufville