A maux étranges, remèdes étranges.
La clinique générale Irabu est une clinique comme toutes les autres, sauf que le département psychiatrie se situe au sous-sol et qu'il n'y a aucune fenêtre!
A cet endroit officie le Docteur Irabu (le fils du propriétaire de la clinique), un bien étrange personnage d'âge mûr, obèse, au teint pâle, obsédé par la piqûre!
Avec un incroyable détachement, un sourire dont on ne voit que les gencives et une apparente désinvolture, il soigne les cas les plus tordus tout en se soignant soi-même.
Dans ce livre aux cinq histoires, le lecteur croise un fou de natation, un homme atteint de priapisme, une narcissique, un accroc au portable et une personne atteinte de troubles obsessionnels compulsifs. Lorsque ces personnages arrivent dans le service, ils pensent que leur calvaire personnel va prendre fin grâce à une solution médicale. Or, ils ne trouvent qu'un médecin "échoué sur son fauteuil" qui vous propose immédiatement une piqûre de glucose, et une infirmière peu amène et exhibitionniste. A défaut de trouver des solutions concrètes à leurs maux très contemporains, ils se retrouvent à devoir gérer les conseils peu conformistes du praticien.
"Le médecin est un homme un peu original mais, une fois habitué, vous verrez que tout se passera bien."
Original est bien le mot, mais quand on y regarde de plus près, Irabu soigne le mal par le mal. En confrontant ses patients à leurs propres excès, il provoque un effet déclencheur souvent salutaire.
A force de nager, Kazuo se rend compte qu'il tente de noyer ses problèmes de couple; Tetsuya comprend enfin que sa verge cessera d'être au garde à vous quand il osera dire ce qu'il pense et expulsera sa colère; Hiromi croit être suivie dès qu'elle est dehors, mais n'est-ce pas sa haute estime de soi qui provoque cette impression? Yûta croit avoir plein d'amis en envoyant plus de deux cents SMS par jour, mais est-il vraiment un ami aux yeux des autres? Enfin, Yoshio n'arrive plus à vivre normalement, envahi par des TOC toujours plus nombreux qui obsèdent son esprit.
Sous couvert d'humour et en employant un ton assez léger, Hideo Okuda dénonce les travers de son temps. Irabu ne soigne pas des corps mais des âmes en souffrance.
"Irabu était certes un original, mais son originalité était précisément une consolation pour lui. Peut-être les excentriques et les imbéciles avaient un effet curatif.Il en venait à penser qu'en cas de nécessité il était probablement préférable de renoncer à son bon sens."
Alors, pervers immature pour les uns, génie pour les autres, le Docteur Irabu est un personnage haut en couleurs qui ne laisse personne indifférent.
Le lecteur sourit souvent, se sent parfois déconcerté par les remèdes prescrits, mais il est finalement content de lire un recueil original et bien plus profond qu'il n'y paraît.
Lecteurs trop sérieux s'abstenir!
(Merci à Hélène F. pour le cadeau)