vendredi 7 novembre 2014

Prodigieuses créatures, Tracy Chevalier

Ed. Folio Gallimard, juin 2011, traduit de l'anglais (USA) par Anouk Neuhoff, 432 pages, 8.4 euros.

Mary et Elizabeth


Issue de la classe ouvrière, Mary Anning en impose par ses yeux perçants et noirs, depuis que, toute petite, elle a été frappée par la foudre.
Elizabeth Philpot est d'extraction bourgeoise. Contrainte de vivre avec ses sœurs dans le village de Lyme pour réduire les dépenses de la famille, elle se jette corps et âme dans la recherche de fossiles de poissons. C'est au cours de ses errances en bord de mer qu'elle y rencontre Mary qui, elle aussi, "chasse" les fossiles. Une belle amitié naît au milieu du "cimetière des serpents", dalle calcaire remplie de "restes" d'ammonites. Qui dit amitié féminine, dit querelles....
Ce n'est pas le centre du sujet de ce roman. La passion de ces deux femmes les unit, surtout dans une société où cette dernière est préférable au foyer. A l'époque, elles n'étaient même pas acceptées à la "Geological Society" de Londres!
Au fur et à mesure des découvertes de Mary, notamment celles de l'ichtyosaure et du plésiosaure, les mentalités font évoluer, abandonnant peu à peu la théorie de l'évolution selon Aristote. Seule la Bible pose problème: comment concilier les écrits divins avec les découvertes scientifiques?
Certes, "la géologie doit toujours être utilisée pour servir la religion, étudier les prodiges de la création divine et s'émerveiller du génie de Dieu", mais les fossiles rendent ces affirmations peu crédibles...
Les deux héroïnes ont su braver les interdits de leur condition de femme, et celles des mentalités pour profiter de leur passion et devenir l'égal des scientifiques masculins. En donnant voix aux deux héroïnes par une alternance de chapitres et de styles, Tracy Chevalier a écrit un roman typiquement féminin où les hommes, par la force des choses, commencent à respecter leur travail.
 Cependant, à force de vouloir bien tout expliquer, le récit pâtit parfois d'un manque de rythme, et souffre de répétitions récurrentes notamment dans la description des falaises anglaises, ou dans la chasse aux fossiles. Néanmoins, ce livre mérite un intérêt singulier à cause de son sujet original et la mise avant de deux figures féminines qui ont contribué largement à l'avancée des théories sur l'évolution.