Illustrations de Sandrine Bonini
Manger est le propre de l'homme
Dans une petite ville inconnue rongée par la crise, dans une rue où les voisins en âge de travailler partent les uns après les autres, se dresse la maison de Sara et ses parents, en face de la décharge municipale. Cet endroit est un havre de paix au milieu du chaos ambiant et le jardin reste entretenu. La famille a même recueilli la grand-mère depuis que l'huissier lui a saisi son appartement. Elle vit désormais au fond du jardin dans une cabane aménagée...
Sara est une petite fille assez solitaire. Un peu par défi et surtout par vengeance que ses parents n'aient pas considéré son acte de ranger sa chambre comme un acte exceptionnel, elle décide d'être végétarienne.
Végétarienne est un mot qui lui plaît d'ailleurs: "elle rayonnait. Ce mot lui allait bien. Comme un vêtement original et magnifique. Elle n'était plus seulement une fille et une élève, elle avait un truc bien à elle."
D'ailleurs, sa grand-mère la soutient dans sa démarche, tout en lui précisant qu'on peut manger de tout à partir du moment qu'on en connaît l'origine. En effet, "manger est le propre de la vie", alors respecter un strict régime alimentaire est un peu ridicule...
Pour convaincre sa petite fille, elle lui raconte une étrange histoire: "Il y a longtemps, les légumes étaient des animaux comme les autres.. Mais ils étaient paresseux, alors ils ont pris racine. Tu peux voir leurs ancienne bouche et leurs membres, leurs yeux."
Exaltée et convaincue, Sara décide de faire honneur à leur ancienne condition en créant un zoo des légumes dans son jardin. Non seulement elle se heurte à l'incompréhension des enfants de son âge, mais aussi à la précarité de ses "nouveaux prisonniers"; très vite leur aspect change, même s'ils reçoivent tous les soins.
Au delà de cette gentille petite histoire, l'auteur tente de convaincre les plus difficiles à table. En effet, il file la métaphore du légume comme ancien animal, et insiste sur le fait qu'il faut manger tous les légumes afin de pouvoir "conserver l'équilibre des forces" entre eux. Finalement, au lieu de rester des "êtres vivants retenus prisonniers par leurs racines", ne faut-il pas mieux être dégustés pour pouvoir goûter à la liberté?
Enfin, la question de vie/mort est soulevée en filigrane sans pour autant s'appesantir.
L'histoire est originale, drôle, et incite le jeune lecteur à la réflexion.
Bonne lecture!
A partir de 8 ans