jeudi 7 novembre 2013

Paperboy, Pete Dexter

Ed. Points Seuil, traduit de l'anglais (USA) par Brice Matthieussent, octobre 2012, 372 pages, 7.6 euros

La perfection n'est pas de ce monde 

 

Première incursion dans l'univers de Pete Dexter dont le style se rapproche beaucoup de la forme utilisée pour écrire un article de journal: les faits, rien que les faits, le reste après.
Au départ, rien de bien original: un duo de reporters enquête sur le meurtre du shérif du Comté de Moat, bien connu pour sa violence et sa partialité. Un homme, Hillary Van Wetter, a été jugé et condamné à mort pour ce crime. Or, en cherchant bien, il s'avère que les preuves sont bien minces, et puis, on a trouvé le coupable idéal, Hilary Van Wetter étant le rejeton d'une famille de marginaux du coin. D'ailleurs, même en lui rendant visite, les deux journalistes se rendent compte qu'il n'est pas homme avec qui on sympathise facilement...
Les deux journalistes forment un duo et pourtant tout les oppose: Ward est "droit dans ses bottes", travailleur, têtu, fils d'un propriétaire de journal, et discret. Par contre, Yardley est un coureur de jupons, carriériste, souvent cynique, exploitant les recherches de son collègue pour écrire les articles.
A force de recherches, ils prouvent le dysfonctionnement de la justice et Van Wetter est libéré; leur article obtient même le Prix Pulitzer, mais "un secret inavouable" concernant Ward, survenu lors d'un déplacement pour rechercher des preuves, remet tout en question.
Le narrateur est Jack, le cadet de Ward. Il ne juge pas son frère, l'observe et l'admire en silence, puis assiste impuissant à son auto-destruction. Dès lors, le meurtre du shérif ne devient qu'un prétexte pour mettre en scène le personnage central, Ward, l'idole (de son père et de son frère) bientôt déchue, happé par un système qui ne souffre aucun écart.
Le lecteur est emporté par ce roman du "tel est pris qui croyait prendre", où les personnages secondaires rivalisent parfois de faux-semblant et de cynisme, et écrasent sur leur passage ceux qui ne savent pas se défendre.