Ed. Le Livre de Poche, mai 2013, 552 pages, 7.9 euros
Nous sommes toutes des familles modèles...
Premier roman TRES prometteur d'Eric Puchner, et gros coup de cœur de littérature américaine.
On
plonge corps et âme au sein de la famille Ziller, famille américaine
"modèle" des années 80, trois enfants, une grande maison, un chien....
Sauf que Warren, le père, ne sait pas comment annoncer à sa tribu qu'ils
n'ont plus rien, que le rêve américain rempli du soleil californien,
des plages, du surf, des barbecues, et des dépenses sans avoir besoin de
regarder le compte en banque, est terminé car toutes les économies ont
été englouties dans le projet immobilier du père. En effet, ce
lotissement dans le désert "pour lequel il avait tout sacrifié, jusqu'à
l'avenir de ses enfants - tournait au désastre." Warren ne dort plus et
attend que les huissiers annoncent d'eux-mêmes au reste de la famille
les lendemains désenchantés. Or, Warren, boosté par un week end camping
en famille décide de tout annoncer: ses enfants semblent indifférents,
quant à son épouse Camille, elle minimise en disant qu'ils restent "une
famille" malgré les vicissitudes de la vie. Or, à la page 264, tout
bascule...La richesse de ce livre tient au récit simple de la vie de ces
cinq personnages. Du couple Warren-Camille, des enfants Lyle, Jonas et
Dustin, on se sent solidaire. Au fil des pages, on pourrait croire que
le lecteur va être le témoin de l'anéantissement social d'une famille,
mais il assiste en fait à la poursuite de "cette putain de vie" qu'on
accepte sans broncher, qu'on tente d'amadouer et de rendre meilleure par
le biais d'un projet de vie, de souvenirs qu'on idéalise avec le temps,
par la force de la condition humaine, tout cela sous l'œil bienveillant
et hautement symbolique du chien qui ne finit pas d'agoniser. On ne
sombre jamais dans le pathos, par contre on sourit beaucoup et on fait
corps avec les protagonistes. L'auteur ne cherche pas l'empathie du
lecteur; On s'y retrouve un peu dans les galères, les mauvaises pensées,
les remords et les joies de cette famille modèle. Finalement, Eric
Puchner a écrit un véritable roman social moderne, un peu comme Balzac
le faisait au 19ème siècle, et sa réussite tient du fait que son roman
est passionnant du début à la fin. Un auteur à suivre.