mardi 29 octobre 2013

Dans le silence du vent, Louise Erdrich

 Ed. Albin Michel, traduit de l'anglais (USA) par Isabelle Reinharez, août 2013, 480 pages, 22.5 euros

Geraldine, Bazil et leur fils unique Joe forment une famille unie. Joe est ce qu'on appelle communément "une enfant de vieux", arrivé à un moment où on ne l'attendait plus vraiment, tellement désiré et trop attendu.
Un dimanche, père et fils s'inquiètent de ne pas voir la mère revenir du bureau où elle devait récupérer un dossier. Geraldine revient, mais blessée et visiblement très choquée. A 13 ans, on s'imagine toutes sortes de choses, mais certainement pas sa propre maman violée et ayant fui une mort violente.
Pour Joe, le temps de l'innocence a disparu, le temps de la douceur familiale aussi. Geraldine n'est plus la même, recroquevillée dans son lit à longueurs de journées:
"Son visage était une tâche pâle dans l'air sombre, et ses traits étaient barbouillés de lassitude. Elle ne pesait plus rien, n'était plus que des os saillants."
Bazil, en tant que juge tribal de la réserve, décide de compulser ses vieux dossiers, certain d'y trouver une piste qui le mènera à l'agresseur. Joe l'aide, et avec ses amis, mène sa propre enquête sur les lieux de l'agression.
Très vite, le lecteur apprend l'identité de cette "foutue carcasse", de "l'homme dont l'acte avait pratiquement détaché l'esprit de [sa] mère de son corps". Paradoxalement, l'essentiel n'est pas là. En effet, connaître le violeur ne résout pas tout, car nous sommes sur une réserve indienne, et les lieux du drame ne sont pas bien définis...
A travers un sinistre fait divers, Louise Erdrich met en lumière toute la complexité juridique des zones indiennes réservée. De plus, elle insiste avec tact sur le racisme rampant et fréquent des blancs à l'égard des indiens qu'ils ne considèrent pas comme leur égal..
Joe se rend compte soudain que le monde est plus violent que prévu. Ses parents, sa famille aussi, en voulant bien faire, ne l'avaient pas encore préparer à tant de violence. La nature humaine n'est ni belle, ni mauvaise; elle est constituée d'un fourmillement d'attitudes et de décisions paradoxales qui rendent parfois impossible d'établir une opinion correcte sur une personne.
Au delà du récit, l'auteure nous offre des personnages secondaires hauts en couleurs tels le prêtre, la grand-mère Ignatia et Mooshum, qui redonnent des couleurs à l'ensemble du texte.
Dans le silence du vent est un roman très intéressant sur l'innocence perdue, le statut indien en Amérique, mais très linéaire dans le traitement de l'intrigue.