Ed. Inculte/IMHO, août 2013, 164 pages, 15.9 euros
"Ce n'était pas une guerre comme les autres."
Ancien casque Bleu envoyé dans les Balkans pour sécuriser une ville en
ruine, il revient au pays, démoli. Ses journées, il les passe enfermé
dans son appartement à boire et dormir. Lui reviennent sans cesse les
images de cette guerre; non pas l'horreur des combats, car il ne les a
pas vécus, mais les dommages dits collatéraux: les victimes civils, les
chiens errants, les magasins pillés, la ville telle un spectre.
Depuis, il comprend son inéquation au monde qui l'entoure. Les médias (presse, radio, télé) relaient en permanence les souffrances de là bas, mais pour Narval, impossible d'oublier:
"Il est là sans être là, à la surface du monde, et comme un mirage déplorable et macabre auquel il jette son regard."
Pourtant, il a bien essayé de renoué avec la "vraie vie", avec les habitudes, mais rien n'y fait; il est trop tard pour lui maintenant:
"Se laisser prendre dans le ressac des habitudes, se dissoudre dans la trame obscure du quotidien s'est avéré, en dernière instance, impossible. Depuis quelques mois, il est un homme que rien ne réchauffe ni n'éclaire, et l'inertie de cette vie fait qu'il se nourrit n'importe comment- et qu'il boit en abondance."
Alors Narval décide de fuir. Il quitte son logis, prend sa voiture, et taille la route. La focalisation externe rend possible la distanciation entre le lecteur et le personnage. Parfois, lorsque Narval se souvient des Balkans, on passe au pronom personnel "tu", comme pour encore insister sur la distance.
La fuite se fait aussi dans son cerveau; ce dernier s'émiette, s'effrite. Depuis qu'il a osé tirer sur un chien errant dans la ville en ruine, Narval a, dans sa tête, passé la frontière entre la civilisation et la barbarie. Lui reviennent alors ses lectures de Melville ou Conrad...
Avec le sentiment insistant que son existence est superflue, "dérisoirement gratuite", on pourrait croire que la fin de ce récit est toute trouvée. Eh bien non. Le dénouement reste paradoxalement ouvert vers une compréhension plus large, un horizon positif. Car la question fondamentale à éclaircir n'est pas "de savoir qui tu es, mais de savoir si tu es."
Un roman tendu, incisif et dense.
Depuis, il comprend son inéquation au monde qui l'entoure. Les médias (presse, radio, télé) relaient en permanence les souffrances de là bas, mais pour Narval, impossible d'oublier:
"Il est là sans être là, à la surface du monde, et comme un mirage déplorable et macabre auquel il jette son regard."
Pourtant, il a bien essayé de renoué avec la "vraie vie", avec les habitudes, mais rien n'y fait; il est trop tard pour lui maintenant:
"Se laisser prendre dans le ressac des habitudes, se dissoudre dans la trame obscure du quotidien s'est avéré, en dernière instance, impossible. Depuis quelques mois, il est un homme que rien ne réchauffe ni n'éclaire, et l'inertie de cette vie fait qu'il se nourrit n'importe comment- et qu'il boit en abondance."
Alors Narval décide de fuir. Il quitte son logis, prend sa voiture, et taille la route. La focalisation externe rend possible la distanciation entre le lecteur et le personnage. Parfois, lorsque Narval se souvient des Balkans, on passe au pronom personnel "tu", comme pour encore insister sur la distance.
La fuite se fait aussi dans son cerveau; ce dernier s'émiette, s'effrite. Depuis qu'il a osé tirer sur un chien errant dans la ville en ruine, Narval a, dans sa tête, passé la frontière entre la civilisation et la barbarie. Lui reviennent alors ses lectures de Melville ou Conrad...
Avec le sentiment insistant que son existence est superflue, "dérisoirement gratuite", on pourrait croire que la fin de ce récit est toute trouvée. Eh bien non. Le dénouement reste paradoxalement ouvert vers une compréhension plus large, un horizon positif. Car la question fondamentale à éclaircir n'est pas "de savoir qui tu es, mais de savoir si tu es."
Un roman tendu, incisif et dense.