Ed. Ecole des Loisirs, novembre 2012, 286 p. 15,20 €
Au bout du monde, sur un continent qu’on
soupçonne fortement être l’Océanie, une petite fille vit avec son
grand-père. Paohétama est orpheline : son père a disparu en mer, et sa
mère, pour empêcher la colère des dieux, a été envoyée en sacrifice vers
« le Ventre du Monde », île proche de l’Autre Terre, de l’autre côté de
la mer, habitée par « les hommes-cochons ».
Paohétama connaît tous les secrets de la
pêche, or, chez elle, ce n’est pas une occupation de femme. Alors, son
grand-père, en accord avec le chef du village et le sorcier, décide de
lever le « tapu » (tabou) et d’en faire une « fille-garçon ». Désormais,
la tête rasée, la petite fille a changé symboliquement de sexe et peut
devenir le digne héritier du maître pêcheur.
Seulement, à douze ans, on se pose
beaucoup de questions. Pourquoi, Oana, le dieu de tout, a-t-il emporté
ses deux parents ? Et puis, à quoi ressemble véritablement le Ventre du
Monde tant redouté par le peuple ?
« Il y a au large de Notre Terre,
une minuscule terre appelée le Ventre du Monde. C’est là que le monde
est né, au début des temps, car c’est ici qu’est née la mer. Plus tard,
le ciel a fécondé les eaux, et Oana est apparu. Plus tard encore, les
poissons et toutes les créatures. Tout vient donc du ventre du monde.
– Mais qu’est-ce que c’est, le Ventre du Monde ?
– Un coquillage géant, de la taille
du grand banian. Vingt fois plus gros que le plus gros des petits
ventres ! Il occupe toute sa terre. Il est à demi immergé, logé dans une
grotte à sa taille, comme dans un morne creux ».
N’écoutant que son courage, Paohétama
charge une pirogue et décide d’entreprendre le grand voyage vers
l’inconnu, non seulement pour prouver aux siens sa vaillance, mais aussi
pour trouver des réponses et mettre du baume à son cœur d’enfant.
L’histoire est belle, le récit est
captivant. Outre le fait que le lecteur est tout de suite dépaysé par le
lieu de l’action, l’auteur renforce l’originalité en proposant une
intrigue aux multiples inconnues. En effet, on connaît si peu de choses
sur les mœurs et coutumes de ces peuples lointains !
Pas de vahinés qui se déhanchent, pas de
colliers de fleurs… les clichés sont mis à mal ! Au contraire, nous
allons à la rencontre d’un peuple tolérant, aux croyances millénaires,
fantasmant sur « les hommes-cochons », ennemis depuis la nuit des temps,
dont le seul fait d’arme est de vivre sur l’île en face de la leur…
La traversée de Paohémata vers le Ventre
du Monde fait parfois écho au « vieil homme et la mer » d’Hemingway
dans sa description de la solitude sur l’étendue liquide. Cependant, la
comparaison s’arrête là. En effet, ce roman est un roman
d’apprentissage. Il explique symboliquement le passage de la jeunesse
vers l’âge adulte : Notre Terre est celle de l’enfance et l’insouciance,
et l’Autre Terre, celle de la maturité.
Au ventre du Monde est un bon roman jeunesse, facile à lire, et qui propose une touche d’originalité non négligeable.
A partir de 12 ans