Ed. Le Rouergue, octobre 2012, 128 pages, 8.10 euros
Australie,
de nos jours. Mia et Thor sont jumeaux. Tandis que Mia est une élève
modèle, Thor se rapproche de la bande de petits délinquants du coin,
histoire de se faire accepter et devenir un caïd. L'adolescence est en
train de les séparer, il n'y a plus que la nuit qui les rapproche. En
effet, les jumeaux ont la particularité de faire des rêves similaires et
prémonitoires. Autant Mia y accorde de l'importance, autant Thor les
rejette.
Un jour, le collège accueille un nouvel
élève, Crusoé. Rien de bien exceptionnel jusque là sauf que le jeune
homme a la peau sombre, et issu d'une famille aborigène, ce qui pour le
lecteur n'est pas si exceptionnel que ça, étant donné que l'action se
situe en Australie, mais apparemment ça l'est dans un établissement
accueillant essentiellement des "blancs bien sous tous rapports".
Premier cliché.
Alors que Thor déteste d'emblée Crusoé à
cause de ses prouesses sportives, sa gentillesse, et surtout, la
couleur de sa peau, Mia se rapproche de plus en plus de lui. Petit à
petit, on sent que Crusoé devient le "ticket d'entrée" probable de Thor
dans la bande qu'il côtoie; petit à petit, il y a de la bagarre dans
l'air, teintée de racisme anti-aborigène.
Mais, Crusoé disparait subitement,
sans laisser de traces. Au même moment, les jumeaux refont des rêves
prémonitoires, sont en proie à de drôles de visions. Pour comprendre,
Mia décide d'étudier de plus près les coutumes aborigènes, et se rend
compte que le rêve en est justement le principe fondateur. Second
cliché.
A partir de là, ce qui apparaissait
comme une gentille histoire ado teintée de rivalité avec une leçon de
morale sur le racisme, devient un récit d'initiation aborigène qui
tourne mal, agrémenté d'événements improbables, et ponctué de dialogues
insipides censés donner des explications au lecteur sur la vraisemblance
de l'explosion de la maison des jumeaux, ou de la grotte souterraine
remplie de peintures aborigènes, ou encore de l'apparition du plombier
qui s'avère être le détenteur de pas mal de secrets. Bref, les clichés
s'accumulent si bien qu'à la fin, le peu d'informations glanées ça et là
sur les croyances du premier peuple australien et leurs mythes, ne
sauve pas l'ensemble du naufrage.
Mais à quoi rêve Crusoé finalement?
Brutalement disparu au début du roman pour réapparaître furtivement à la
fin, Crusoé est le maigre fil d'Ariane qui explique les rêves
prémonitoires de Mia et Thor, et les catastrophes en chaîne. La première
partie traitant du racisme larvé est complètement abandonnée au profit
d'une seconde partie "abracadabrantesque" sur les rites d'initiations
aborigènes. Et c'est là que le bât blesse. A force de clichés, l'auteur,
sûrement sans le vouloir, accroit le fossé concernant les idées
préconçues et "bien pensantes" des Australiens blancs sur la communauté
aborigène.
Finalement, tout n'est pas pour le mieux
dans le meilleur des mondes possibles au pays des Kangourous, et on ne
sait toujours pas quels sont les rêves de Crusoé.