En France, une épidémie hors de contrôle a poussé la population a fuir le territoire par tous les moyens. Certains d'entre eux se sont échappés sur un ferry qui, après quelques jours de voyage s'est échoué au large d'une petite île. Tous ont survécu et tentent de construire une mini-société, persuadés qu'il ne faut pas rater ce coup de pouce du destin.
"Mais sur cette île une vie meilleure s'offrait. (...) La catastrophe était leur chance".
Seulement pas facile de rester civilisé, car "être humain c'est du boulot" dit l'un d'entre eux. Très vite, trois groupes se créent : les zombies, regroupant des gens choqués par les événements et qui vivent à l'écart à la limite de la catatonie, les Partants dirigés par Albany, une doctoresse, qui cherchent à rejoindre le continent en construisant une embarcation, et enfin les Basques, dirigés par Elorriaga, un brin dictateur, dont le désir à long terme et de vivre autrement en restant sur l'île.
"Ils allaient, par le travail, se déciviliser. Dans le monde d'avant, on leur avait appris à vivre insatisfaits et c'était comme une maladie inoculée en eux. Il fallait s'en purger".
Les deux clans s'opposent, la violence fait son apparition et les fortes personnalités prennent le dessus.
"Ils voulaient qu'on les oublie. Que personne ne sache qu'ils étaient sur cette île. De survivants, ils étaient devenus des fugitifs".
Des Jours Sauvages a pris le prétexte de la pandémie pour offrir une variante moderne de Sa Majesté des Mouches de William Golding. Comme l'auteur anglais, Xabi Molia traite de la difficulté à rester civilisé, à obéir aux règles dans un contexte particulier isolé de tout. Le pouvoir est un enjeu majeur pour la survie. "Puisque tout est fini, tout est permis", pourrait-on croire. Or, le roman décrit une lutte à long terme contre l'anarchie et le despotisme. Plus on avance dans le récit, plus la notion d'avenir reste incertaine, alors qu'on sait, à travers les lignes, qu'il y a eu un retour en société et que les protagonistes ont témoigné de leur expérience.
"L'avenir, ils ne savaient pas quoi en faire. C'était une chose flasque et insaisissable".
Parfois caricatural dans le traitement des rapports de force entre les personnages, le roman reste intéressant dans son approche sociétale de l'adaptation d'un groupe confronté à un contexte inédit. Dès lors, on s'aperçoit que les possibilités de l'Homme pour parvenir à ses fins sont quasi illimitées, et cela fait froid dans le dos.
Ed. Seuil, collection Fiction & Cie, 256 pages, 19€