lundi 16 novembre 2020

La douceur du coeur

 


Anzu est céramiste. Créer des vases et vivre de son art lui a permis de retrouver la plénitude après son divorce. Au pied du mont Daisen, elle rythme son quotidien entre la préparation de sa prochaine exposition, ses parents et son petit garçon Toru. 

"La poterie est indispensable à ma vie. En pétrissant de l'argile avec mes mains puis en façonnant une pièce, j'oublie tout ce qui se passe autour de moi. Et, chaque fois, au moment de sortir mes œuvres du kama, je suis à la fois très excitée et soulagée comme après un accouchement".

Quand sa sœur aînée Kyôko annonce qu'elle va se marier, Anzu est étonnée. Longtemps Kyôko a assumé sa réputation de séductrice, n'hésitant pas à attirer dans ses filets ceux qui s'intéressaient à sa sœur, jusqu'à son ex-mari.. Or, l'heureux élu dans le cœur de Kyôko, Yûji, est aux antipodes de ce que s'était imaginée la céramiste. Calme, doux, charmé par le travail de sa future belle-soeur, il ne correspond pas du tout au profil des anciennes conquêtes de la jeune femme.

Lorsqu'Anzu rencontre Yûji, c'est le coup de foudre. Néanmoins, elle se refuse d'agir comme son aînée. La poterie lui donnera la force, un temps, d'affronter cet amour inattendu et se consacrer à son exposition dont l'œuvre maîtresse est un vase qu'elle a appelé Suzuran.

"C'est impossible de prévoir le résultat. C'est accidentel, comme la vie".

explique Anzu à propos de la couleur que prennent ses œuvres en cuisant dans le Kama. Justement, l'accident prend la forme de la maladie incurable de Kyôko.

Suzuran se lit d'une traite. Le récit est à l'image de la narratrice. La douceur est le maître mot. Même les ellipses narratives ne plombent pas l'ensemble. Le décor naturel, l'art ancestral de la poterie nippone et la sagesse d'Anzu font de ce roman une parenthèse enchantée, une véritable pause dans la folie du monde. A lire et à relire.


Ed. Actes Sud, octobre 2020, 168 pages, 15€