Il a fallu que Donald Trump arrive au pouvoir pour que Bret Easton Ellis propose une vaste réflexion sur la société américaine dans laquelle il vit. Ce n'est pas innocent car son personnage d'American Psycho, Patrick Bateman prend Trump comme modèle.
On est loin d'une société neurasthénique, subissant le revers démocrate de novembre 2016. Certes, il y a ceux qui ont voulu Trump au pouvoir mais continuent à ne pas s'en vanter, et il y a les autres qui continuent à vivre dans le déni, refusant d'admettre la réalité, se mettant même en colère quand on ose évoquer l'événement.
Ellis, lui, n'a pas de point de vue. Il n'a même pas voté en 2016. Cependant, il a observé ceux qu'il côtoient de manière privée ou professionnelle pour mieux prendre le pouls de son pays. Et puis, surtout, il y a les réseaux sociaux, véritable plaie névrotique, qui lisse l'opinion publique et cloue au piloris celle ou celui qui exprime une idée différente de la masse.
Ellis ne se reconnaît pas dans cette société dans laquelle les gens pensent tous la même chose ou le font croire pour être accepter des autres. Alors pour exister, un phénomène de victimisation s'est installé.
"Mieux se poser en victime est comme une drogue - vous vous sentez délicieusement bien, vous obtenez tant d'attention de la part des autres, vous vous sentez en vie et même important, alors que vous exhibez vos prétendues blessures afin que les gens puissent les lécher. Est-ce qu'elles n'ont pas un goût exquis ?"Plusieurs fois l'auteur explique que son roman American Psycho décrit fort bien les dysfonctionnements de la société actuelle - alors qu'il a été écrit trente ans plus tôt - et que son héros sociopathe, Patrick Bateman est le fruit des excès et de l'argent facile de l'Amérique. L'American way of life en prend un coup...
White n'est pas un roman ; c'est le témoignage et la réflexion d'un écrivain célèbre sur ce que vit son pays. L'intérêt au contenu reste assez inégal. Parfois, le texte pâtit de coquilles, de ruptures de construction ou de phrases interminables. Alors est-ce une traduction fidèle marquant une pensée brute qui chemine, ou est-ce une traduction qui a souffert de passages difficiles à exprimer ? Mystère...
Ed. Robert Laffont collection Pavillons, mai 2019, traduit de l'anglais (USA) par Pierre Guglielmina, 312 pages, 21.50€