Quand Sujin revient à lui, il est dans sa chambre sur un matelas
maculé de sang. Bientôt, il découvre le corps sans vie de sa mère au rez-de-chaussée.
Commence alors une longue introspection ponctuée de souvenirs et de ruses pour
cacher le drame.
"L'oubli est le mensonge le plus abouti, le mensonge le plus parfait que l'on puisse faire à soi-même. C'est aussi la dernière carte que pouvait jouer mon cerveau".
Sujin est un jeune homme de vingt-six ans en apparence en bonne
santé. En apparence. Car, il vit chez sa mère qui le surveille étroitement
depuis le décès accidentel de son époux et de son premier fils qu’elle adorait.
Ses relations avec le cadet ont toujours été plus difficiles surtout depuis que
la tante des enfants a vu en Sujin un futur sociopathe.
"Si ma mère et ma tante sont les personnes qui ont manipulé ma vie, les médicaments sont les cordes qui m'ont ligoté. A chaque tournant majeur de ma vie, je me suis pris les pieds dans ces cordes et me suis retrouvé à terre".
Ainsi, depuis sa jeune adolescence, le jeune homme est
médicamenté ; une camisole de l’esprit dont de temps en temps il se permet
de se libérer en s’abstenant de prendre ses cachets. Or, ne pas prendre son
traitement signifie pour lui des pertes de mémoire, de la confusion, mais
surtout une attirance certaine pour le sang…
Quand il retrouve le corps de sa mère égorgée, Sujin décide de
cacher le cadavre de son frère adoptif Haejin afin de conserver son amitié et
sa confiance.
"Si ma mère était celle qui injectait de terribles angoisses dans mes veines, Haejin était celui qui soufflait la douce chaleur du crépuscule dans mon cœur. Un être qui me disait qu'il serait toujours de mon côté".
N’empêche qui a pu tuer sa mère, surtout avec la porte verrouillée
de l’intérieur ? Des indices montrent que Sujin est encore une fois sorti
courir en pleine nuit et sous la pluie. En plein sevrage, Les souvenirs
remontent, les désirs refoulés aussi, et ils dévoilent une vérité difficile à
accepter.
"L'excitation électrise tout mon corps. J'étouffe. Je ne pouvais pas ne pas faire ce dont j'étais capable, sous peine de devenir fou. Ce n'est pas moi qui tenais la lame, c'est la lame qui m'a pris la main et m'a attiré dans la gorge de la femme. C'est une force redoutable qui ne m'a laissé aucune chance. (...) Je viens de traverser la frontière qui mène à un autre monde. Je me rends compte que non seulement il n'existe pas de chemin de retour, mais aussi de volonté de retour".
Généalogie du mal est une introspection au cœur de la
névrose du personnage principal. L’auteure ne demande pas au lecteur de
comprendre. Elle se contente d’exposer cliniquement les faits en remontant le
temps. L’enfance, l’éducation, l’entourage familial sont autant d’indice
permettant d’expliquer les raisonnements, les secrets et le comportement
criminel du héros.
Le roman est finalement une plongée dans l’enfer d’un homme qui
découvre qui il est réellement.
Ed. Picquier, avril 2018, traduit du coréen par Choi Kyungran et
Pierre Bisiou, 400 pages, 21.90€
Titre original : The Good Son