vendredi 17 octobre 2014

La femme du tigre, Téa Obreht

 Ed. Le livre de Poche, traduit de l'anglais par Marie Boudewyn,  mars 2013, 432 pages, 7.1 euros

Légendes des balkans


Dans un pays des Balkans jamais nommé mais qu'on soupçonne fortement être l'ex-Yougoslavie, Natalia, la narratrice, médecin en mission humanitaire dans les montagnes, apprend que son grand père est décédé. Lui aussi médecin, il avait caché sa maladie et avait prétexté un voyage pour mourir seul.
Natalia et son grand père avaient une forte relation; il l'emmenait invariablement, chaque semaine, voir les animaux du zoo, notamment le tigre, qui, semble-t-il avait une symbolique particulière sur lui. De plus, il lui racontait les histoires et légendes de son pays, contrée marquée par des superstitions et des croyances diverses et variées, transmises de génération en génération.
"Tout ce qu'il faut savoir pour comprendre mon grand-père tient en deux histoires: celles de la femme du tigre et de l'homme-qui-ne-mourra-pas.(...) L'une d'elle (...) explique dans quelles circonstances il est devenu un homme; une autre, qu'il m'a lui-même transmise, raconte comment il est redevenu un enfant."
Vivre dans un pays en proie à des conflits armés incessants fait que chacun développe sa propre stratégie "d'évasion" pour résister nerveusement. En effet, "la guerre chamboula tout. Une fois dissociées, les composantes de notre ancien pays perdirent leurs caractéristiques de jadis, du temps où elles formaient les parties d'un tout. Ce qui était jusque là commun -les mots, les écrivains, les scientifiques, les anecdotes- nous dûmes nous les répartir et nous les réapproprier."
Ainsi, pour Natalia, les histoires de son grand père servent de refuge...

Dans ce roman étrange, qui fait penser au Livre des Nuits de Sylvie Germain, l'auteur a mélangé croyances, superstitions, histoire familiale. Il n'y a pas à proprement parler d'intrigue, mais la trame fictionnelle fonctionne et reste cohérente de bout en bout.
Natalia est celle qui rassemble des bribes de récits dont le tigre, évadé du zoo lors des bombardements, devient le symbole.
Le lecteur se prend facilement au jeu et se laisse emporter par trois histoires originales racontées avec un style enlevé et facile à lire à la fois.
Une belle découverte.