De la possibilité de l'imperfection.
En mathématiques, celui qui aura démontré l'hypothèse de Riemann sera non seulement célèbre, mais aussi l'instigateur d'une nouvelle vision du progrès scientifique. Un soir, le professeur Andrew Martin vient à bout de ce problème. Seulement, il n'a pas le temps de profiter de sa découverte, car surveillé par un comité scientifique d'une planète lointaine, il est aussitôt éliminé et remplacé par un clone en tout point semblable. Sa mission: liquider ceux qui sauraient par hasard que Martin a fait une découverte fabuleuse, et taire la démonstration.
En effet, les lointains habitants de la planète Vonnadoria, immortels, ne vivent que pour la culture des maths, et surtout considèrent que les humains ne sont pas capables de tirer profit sainement de la démonstration de l'hypothèse de Riemann. Considérant l'espèce humaine comme primitive et incapable de belles choses, c'est donc engoncé dans ces idées reçues que le double de Andrew Martin débarque à Cambridge. Son arrivée ne se fait pas dans la discrétion. Nu et pas encore familiarisé avec la langue, ses premiers contacts avec ses nouveaux congénères se font dans un imbroglio pas possible, si bien que son épouse le récupère à l'asile.
"En gros, la règle de base, si vous voulez passer pour sain d'esprit sur Terre, est de se trouver au bon endroit, de porter des vêtements appropriés, de dire les paroles de circonstances et de ne marcher que sur les pelouses autorisées."
Au fur et à mesure, le nouvel Andrew fait la connaissance de sa famille, de ses collègues, tout en découvrant sa nouvelle condition humaine:
"Je n'avais aucune référence; tout était nouveau; je découvrais sans cesse l'archétype immédiat de ce qu'étaient les choses du moins ici."
Lui qui considérait au début les êtres humains comme des créatures hideuses et dénuées d'intérêt, change peu à peu de point de vue. La vie quotidienne avec son épouse Ellen et son fils Gulliver en pleine crise d'adolescence lui apporte de nouvelles émotions jusque là inconnues. De plus, il se rend compte qu'Andrew Martin était un piètre époux et père de famille qui a gâché sa vie privée au profit des mathématiques. A lui maintenant de changer:
"Se soucier des autres fait partie de l'instinct de survie chez eux. Vous veillez sur autrui, et autrui veille sur vous."
Ainsi, le vonnadorien fait l'expérience de l'humanité et il aime ça au point de vouloir garder sa nouvelle identité et abandonner sa mission initiale. Seulement, là-bas, sur sa planète, on ne l'entend pas ainsi, et on se charge de lui faire comprendre...
Humains est la rencontre de la perfection et de l'imperfection. A partir d'une trame inventive basée sur la science-fiction, Matt Haig a construit un roman drôle et touchant qui dresse un panorama des émotions humaines: la faiblesse, la dépression, la jalousie, mais aussi et surtout l'amour.
"La possibilité de la douleur, voilà ce qu'est l'amour", découvre le nouveau Andrew Martin, et ce sentiment là, une fois qu'on l'éprouve, il est impossible de l'oublier. Mieux vaut être perfectible, en proie à ce qu'on ressent, plutôt qu'embrigadé par "la pureté de la raison". Mieux vaut croire aux "visions réconfortantes" et se savoir aimé des siens, plutôt que vivre sans haine ni amour.
L'extraterrestre du début du roman a fait un choix, à lui maintenant de le faire comprendre aux siens.
Ce roman s'adresse aussi bien aux jeunes lecteurs qu'aux adultes car sa portée est finalement universelle. La traduction de Valérie Le Plouhinec a su retranscrire l'humour, les jeux de mots, et les malentendus vécus Par Andrew. Les presque 250 pages se lisent aisément et on ne peut que saluer l'angle d'attaque choisi par l'auteur pour expliquer simplement ce que nous sommes.
Adaptation en cours pour le cinéma.
A partir de 13 ans.