lundi 3 février 2014

Partie commune, Camille Bordas

Ed. Joëlle Losfeld, août 2011, 216 pages, 16.75 euros

Les maisons ont une âme!


Une maison en ruine est rachetée par le directeur d'une troupe itinérante qui décide de la transformer en théâtre.


C'est un livre frais, bien écrit, qui ne se préoccupe pas du ton employé car on est plus dans le langage familier et (très) courant que dans la recherche stylistique. Camille Bordas a construit son roman autour de trois personnages, mais accorde aussi un point de vue à la maison et aux objets environnants. Cette originalité d'écriture s'accorde bien avec le ton général et ajoute une touche ironique et un point de vue décalé sur le récit. La maison, qui au fond peut être considérée comme un personnage central, commence et termine le roman. Elle fut le témoin de plusieurs générations d'une même famille, puis vendue presque en ruine pour devenir un théâtre. Mais qui sont ces cinq personnes qui viennent s'installer en ses murs et que le voisinage qualifie de saltimbanques?
Autour d'Hector, leur metteur en scène, Isis, Marco et les autres retapent la bicoque et se préparent aux répétitions. Tous possèdent en eux une faille et n'ont pas forcément le profil d'acteurs. Leur pièce ne sera pas issue du répertoire théâtral mais "devra être simple comme un rêve", allégée de tout mot superflu et d' accessoires inutiles, car "trop de mots emprisonnent nos actions". Ce concept novateur sied bien aux personnage en quête d'eux mêmes et d'un nouveau départ. Et pendant que les travaux se font, que les répétitions sont menées, la maison participe à sa manière, se souvient et se prend d'affection pour ses locataires. Jamais l'auteur ne déborde sur le genre fantastique: les objets ne deviennent que des narrateurs supplémentaires occasionnels. Dans le chapitre consacré à Hector, on comprend mieux ce pari fou de transformer une maison en théâtre au sein d'un village. On conçoit aussi qu'il ne peut s'accompagner que d'une vision novatrice du genre: "nous ne sommes pas un miroir, nous ne sommes pas un loisir. Nous ne sommes pas là pour distraire, mais pour libérer l'énergie de nos corps, comme la lave qui s'écoule et fond dans l'eau." Dès lors, la fin proposée apparaît comme une issue vraisemblable et conceptuelle. Un roman sympathique écrit par un auteur à suivre!