Le Bruit et la Fureur
Le Bruit c'est celui que fait la fratrie, narrateur inclus, dans la maison, dehors, bref tout le temps et n'importe quand. Ils sont trois, mais ne font qu'un:
"Nous trois.
Trois frères.
Trois mousquetaires.
Trois histoires."
Le Bruit c'est aussi celui des disputes et des réconciliations cycliques entre les parents, Ma et Paps, qui n'ont de parents que l'appellation mais se révèlent plutôt des compagnons d'infortune qui grandissent en même temps que leur progéniture. Maladroits ou parfois carrément décalés dans leurs gestes d'amour, ils restent cependant un pilier pour Joel, Manny et le narrateur.
La Fureur intervient lorsque les gosses ont faim et que leur mère ne se lève plus à cause du départ inopiné de Paps. La Fureur c'est aussi la violence dans les combats "fratricides" où tous les objets deviennent des armes potentielles:
"quand on se battait, on se battait avec des bottes ou des outils, des tenailles qui pincent, on attrapait tout ce qui nous tombait sous la main et on le jetait; on voulait plus de vaisselle cassée, plus de verre brisé. On voulait plus de fracas."
Le silence n'existe pas. Il est synonyme de néant et d'abandon. Cette famille existe car elle s'aime maladroitement en faisant du bruit et en se déchirant. Mais en grandissant, la fratrie tellement soudée se scinde, le narrateur ne se cache plus derrière ses frères: il "bombe le torse". Il devient un homme. Or celui qu'il devient ne correspond pas aux critères familiaux, et cette découverte provoque la fureur, non pas celle positive qui unifiait le clan familial, mais celle qui rejette et exclut...
Ce premier roman est un récit de bruit et de fureur, c'est aussi un chant d'amour envers une famille peu banale, et un appel déchirant de celui qui en est écarté.