mercredi 30 octobre 2013

Ituk à la rencontre de l'ours blanc, François Beiger et Philippe Mignon

Ed. belin Jeunesse, collection Terres Insolites, mars 2013, 112 pages, 6,90 €

Chez les Esquimaus...

Fort de son expérience de vingt-cinq années auprès des peuples amérindiens et Inuits, François Beiger nourrit sa fiction de ses propres connaissances et, dans ce roman-ci, de ses souvenirs : « l’histoire que je raconte ici, je l’ai vécue en 1995, avec Lucassie et son fils. Ce sont des moments très forts dans ma vie de voyageur de l’Arctique » explique-t-il dans le carnet de voyages situé à la fin du livre.
Ituk est un jeune homme qui va fêter ses dix-huit ans. En France, cet âge c’est l’accession à la majorité, au permis de conduire, au statut d’adulte. Chez les Inuits, c’est différent, on passe de l’enfance au statut d’homme, encore faut-il prouver qu’on est prêt. Alors, pour cela, les jeunes gens doivent se rendre au pays de Nanook afin d’y rencontrer et affronter l’ours blanc. Si Ituk réussit à le tuer, alors il reviendra chez lui, fier, et sa famille le considérera désormais comme un adulte.
« Ituk venait tout juste d’avoir dix-huit printemps, l’âge où le jeune Inuit veut devenir Inuk, c’est-à-dire un homme. C’est donc l’âge où le père guide son fils sur les pistes à la rencontre de Nanook, l’ours blanc. Cette tradition ancestrale Inuit fait du jeune garçon un chasseur capable de subvenir aux besoins de sa famille ».
C’est Kenny, le grand-père d’Ituk qui l’accompagnera, car le père est parti à la chasse pour plusieurs jours. Ce périple en chiens de traîneaux sera aussi l’occasion pour l’aïeul de transmettre à son petit-fils son savoir-faire et ses connaissances. En effet, dans le Grand Nord, c’est la nature qui décide. La neige, la glace, le nordet (vent), les séracs, les loups et les glaciers sont autant de dangers potentiels qu’il s’agit d’éviter ou d’affronter avec le maximum de préparation !
Les voilà partis tous deux avec leurs douze chiens polaires vers Nanook. Forcément, le voyage ne sera pas de tout repos ; ils devront affronter la faim, les blessures, les animaux sauvages, mais toutes ces péripéties seront l’occasion pour Ituk d’avancer à coup sûr vers la maturité et son nouveau statut. Et puis, n’est-ce pas le quotidien de son peuple ?
« Ces moments difficiles, le peuple Inuit les traversait depuis des millénaires. Ils effectuaient inlassablement une sorte de transhumance, conduite par la migration des troupeaux d’animaux. Partis il y a environ quinze mille ans de Mongolie, ces peuples avaient foulé la Sibérie, le détroit de Béring, l’Alaska, puis le Canada et le Groenland ».
Au-delà du simple roman d’aventures, François Beiger nous propose un roman didactique. L’auteur transmet au jeune lecteur ses connaissances sur le monde Inuit, en expliquant, de façon simple et complètement intégrée dans la fiction, les us et coutumes de ce peuple méconnu.
Les quelques mots intégrés en langue Inuit, l’Inuktitut, ainsi que le champ lexical récurrent sur le paysage polaire, sa faune et sa (maigre) flore, facilitent le dépaysement. Cependant, à aucun moment, on se sent submergé par le flot d’informations, car les aventures d’Ituk restent le thème dominant.
Avec ce roman, la collection Terres Insolites remplit complètement son contrat en mariant intelligemment fiction, culture et dépaysement, et en proposant des illustrations de qualité grâce aux dessins de Philippe Mignon.
A partir de 8 ans